Eaudanslaville

Service d’aide aux collectivités proposé par l'OIEau sur les questions liées à l’eau potable, l’assainissement collectif et non collectif.

Lettre d'information du

10 décembre 2020

 

A LA UNE /  Le point sur la révision de la Directive eau potable

 

Introduction

En 2014, deux millions de personnes ont signé la pétition de l'initiative citoyenne « Right2water ». La revendication était la mise en œuvre d’une législation qui garantisse comme un droit l'accès à l'eau et à l'assainissement.

La Commission a décidé que la réponse la plus adaptée à cette requête était de passer par une révision de la Directive eau potable. Bientôt 7 ans après la validation de la pétition, le projet de refonte était espéré pour décembre 2020.

Les grands axes du projet de texte sont les suivants :

  • cadre pour les matériaux en contact avec l'eau ;
  • approche fondée sur les risques ;
  • accès à l'eau et à l'information ;
  • réactualisation des paramètres de qualité.

Pour en savoir plus sur l’avancée du processus de révision de la Directive eau potable :

 

Mise en place de listes de produits autorisés pour les matériaux en contact avec l'eau

 

Différents matériaux dans un réseau

 

Au plus tard trois ans après l'entrée en vigueur de la Directive, les méthodes pour évaluer les composants des matériaux en contact avec l'eau seront identifiés.

Un an après, les produits chimiques autorisés pour la composition de ces matériaux, devront être listés pour chaque groupe : métaux, émaux, céramique, etc.

Ces listes se feront sur la base des données fournies par les États membres qui auront six mois pour les communiquer.

L'Agence européenne des produits chimiques (Echa) aura la charge de la gestion de cette liste. L’Echa réévaluera toutes les substances figurant sur la liste dans les quinze ans suivant sa publication. Chaque substance approuvée sera autorisée pour une période limitée. Le calendrier des réexamens sera basé sur les propriétés dangereuses des substances ainsi que sur la qualité et la mise à jour des évaluations des risques précédentes.

Sur la base des avis de l'Agence, la Commission réexaminera et mettra à jour les actes d'exécution. Les entreprises et les États membres qui souhaitent ajouter ou maintenir leurs substances dans cette liste devront faire une demande à l'Echa, avec une évaluation des risques.

La Commission va demander à un ou plusieurs organismes européens de normalisation, d'élaborer une norme européenne pour des essais et une évaluation uniforme des produits en contact avec l'eau destinée à la consommation humaine.

Pour en savoir plus :

 

Vers des plans de gestion de la sécurité sanitaire des eaux (les PGSSE en France)

Trois châteaux d'eau à Châteauroux

 

L'ensemble de la chaîne d'approvisionnement en eau potable devra être soumis à un plan de gestion des risques. Doivent donc être abordés les niveaux suivants :

  • le bassin versant ;
  • le captage ;
  • le traitement ;
  • le stockage ;
  • la distribution de l'eau.

Cette approche comporte trois volets :

  • Evaluation des risques et leur gestion pour les points de captage : à réaliser au plus tard quatre ans après la date de transposition de la directive.
  • Adaptation de la surveillance aux risques principaux après avoir réalisé une évaluation des risques liés à l'approvisionnement : à réaliser au plus tard six ans après la transposition de la directive.
  • Evaluation des risques des réseaux de distribution nationaux notamment au niveau des lieux où le danger pour la santé humaine a été identifié (établissements de soin, etc.) : à réaliser au plus tard six ans après la transposition de la directive.

Cette approche est déjà en cours d’application en France via la mise en place des PGSSE (plans de gestion de la sécurité sanitaire des eaux) qui a débuté bien avant qu’une directive européenne les rende obligatoires.

Pour plus d’informations :

Formations :

 

Action sur les niveaux de fuite des réseaux

Le projet de Directive demande également à ce qu'une évaluation des niveaux de fuite des réseaux soit réalisée dans les trois ans après sa transposition.

Dans les cinq ans qui suivent, la Commission fixera un seuil, dans un acte délégué, au-delà duquel les États membres doivent présenter un plan d'action. Ceux-ci auront ensuite deux ans pour définir cet ensemble de mesures pour réduire leur taux de fuite.

Pour en savoir plus :

 

Formations :

 

Une évolution des paramètres de suivi de la qualité de l'eau potable

Analyse de l'eau

 

Au cours du processus de révision de la Directive eau potable, ont été remis à jour les exigences minimales et les paramètres pour évaluer la qualité des eaux potables.

Le projet de texte aborde la problématique des polluants émergents.

Les États membres devront donc inclure dans leur législation ces nouveaux paramètres et les valeurs limites correspondantes pour l’eau potable :

  • Bisphénol A : 2,5 μg/l,
  • Chlorite et Chlorate : 0,25 mg/l – avec une valeur de 0,70 mg/l lorsque le chlorite est produit par une méthode de désinfection destinée à la consommation humaine, mais les États membres sont encouragés à fixer une valeur inférieure,
  • Acides haloacétiques (AHA) : 60 μg/l – à mesurer lorsqu’ils sont générés par une méthode de désinfection, comme la somme des acides monochloro-, dichloro- et trichloro-acétiques, et des acides mono et dibromo-acétiques,
  • Microcystine-LR : 1,0 μg/l – à mesurer en cas d’éventuelles efflorescences dans les sources d’eau,
  • Uranium : 30 μg/l,
  • PFAS : 0,50 μg/l,
  • Somme des PFAS : 0,10 μg/l.

Trois ans après l'entrée en vigueur de la Directive, la Commission devra adopter une méthodologie pour mesurer les microplastiques, afin de les inclure ensuite dans la liste de surveillance.

Parallèlement, elle devra se pencher sur des lignes directrices techniques concernant les méthodes d'analyse des perfluorés (PFAS - Perfluoroalkyl chemicals - famille de perturbateurs endocriniens). Les États membres devront ensuite respecter la valeur limite pour ces polluants.

En Europe, les PFAS se retrouvent partout dans les eaux (qu’elles soient de surface, souterraines, potables…) et organismes aquatiques. L’eau de boisson est l’une des principales sources d’exposition pour les humains. Vient ensuite différents aliments. La concentration en PFAS augmente quand ils passent d’un maillon à l’autre de la chaîne alimentaire. Les niveaux sont parfois très élevés en bout de chaîne.

Les effets sanitaires sont, entre autre, les suivants : taux élevé de cholestérol, cancer des testicules et du rein, dysfonctionnement hépatique, hypothyroïdie, petits poids et taille à la naissance, obésité, réduction des taux d’hormones, retard de la puberté, ou diminution de la réponse immunitaire aux vaccins.

Pour en savoir plus sur les perfluorés : ici

Concernant les perturbateurs endocriniens, la liste des seuils de qualité à suivre pour les paramètres chimiques comprend toujours le Bisphénol A mais le Beta-estradiol et le nonylphénol ont été retirés.

Le bisphénol A (BPA) est un composé organique de la famille des aromatiques, utilisé principalement dans la fabrication de plastiques et de résines.

La contamination humaine se fait essentiellement par ingestion, mais un passage par les voies respiratoires ou la peau est possible. Il s'accumule ensuite dans les tissus adipeux.

Le bisphénol A (BPA) est présent dans l'eau potable, et ses dérivés chlorés (Clx-BPA) sont suspectés d’avoir une action de perturbateur endocrinien 100 fois supérieure alors que le chlore est un désinfectant utilisé très fréquemment lors de la production et la distribution de l’eau destinée à la consommation humaine.

La source principale de rejet du 17-Beta-estradiol (E2) est constituée par les eaux usées. Cependant, il faut noter qu’il s’agit d’une hormone naturelle sécrétée principalement par les femmes enceintes (≈63% des rejets naturels au R-U) et que seulement 1 à 8 % du 17-Beta-estradiol (E2) dans les eaux usées (≈4-8 μg/personne/jour pour l’Europe) serait d’origine pharmaceutique. (Source : Inéris : 17-Bêta-Estradiol - Portail Substances Chimiques).

Concernant les nonylphénols et éthoxylates de nonylphénol, vu les effets nocifs sur l'environnement, des recommandations ont été émises quant à leur mise sur le marché et leurs utilisations. Leur usage, lorsqu'il n'est pas interdit, n'est toléré que dans certains systèmes fermés, afin de supprimer progressivement leurs rejets et leurs émissions dans l'environnement. Ces dispositions réglementaires sont décrites dans la Directive 2003/53/CE portant vingt-sixième modification de la Directive 76/769/CEE et transposée par le décret n° 2005-577.

Dans cette liste figurent notamment, comme nouveaux paramètres par rapport à la Directive actuelle, des sous-produits de désinfection (chlorates, chlorites, acides haloacétiques).

Un chlorate (ou trioxochlorate) est un composé chimique contenant l'anion chlorate. Cet anion est la base conjuguée de l'acide chlorique HClO3, et les chlorates sont les sels de cet acide. L’intoxication par ingestion peut provoquer des atteintes sévères : irritation digestive, méthémoglobinémie, hémolyse aiguë, coagulopathie de consommation, insuffisance rénale aiguë, atteinte hépatique (source : Base de données Fiches Toxicologiques INRS Chlorate de potassium, chlorate de sodium).

La présence de chlorites dans l'eau est liée à l'utilisation de dioxyde de chlore en phase de préoxydation ou de pré-désinfection et en phase de désinfection des eaux destinées à la consommation humaine. Les principales réactions d'oxydo-réduction intervenant lors de la mise en œuvre du dioxyde de chlore ClO2 conduisent d'une manière générale à la formation d'ions chlorites (50%), d'ions chlorures (40%) et d'ions chlorates (10%). La voie principale d'exposition est l'eau de boisson.

Le principal effet des chlorites se caractérise par la formation de méthémoglobinémie (taux trop important de méthémoglobine dans le sang).

Nota : Dans l'hémoglobine normale, les noyaux hémiques des sous unités de l'hémoglobine lient un fer ferreux (Fe2+) qui va lier l'oxygène. Dans le cas de la méthémoglobinémie, le noyau hémique va lier un fer ferrique (Fe3+) qui va être incapable de lier l'oxygène.

Source : Ici

 

Parmi les acides haloacétiques :

  • le DCA (Acide dichloroacétique) aurait des conséquences sur la fertilité. Concernant les effets sur le développement, le DCA pourrait se concentrer dans les cellules cardiaques, et interférer avec le métabolisme énergétique au niveau mitochondrial.
  • le TCA (Acide trichloroacétique) peut provoquer des lésions cutanées, orales et oculaires après ingestion. Les signes cliniques rapportés en milieu professionnel sont des rougeurs, enflure, douleur et brûlure au niveau de la peau, des irritations sévères voire des lésions corrosives au niveau de l’œil et des lésions gastro-intestinales.
  • le DBA (Acide dibromoacétique), plusieurs études de courte durée font état d’effets sur le foie, les reins, la rate et l’appareil reproducteur mâle, ce qui démontre que le DBA est suffisamment absorbé pour causer des effets indésirables systémiques.

Pour en savoir plus sur les acides haloacétiques Ici

 

Une toxine produite par des cyanobactéries (microcystine) est aussi un nouveau paramètre. Le terme microcystine désigne une famille de toxines produites par différents genres de cyanobactéries. Les variantes les plus toxiques le sont autant que le curare (à dose égale). Les microcystines sont des molécules hépatotoxines (qui détruisent les cellules du foie en désorganisant leur cytosquelette).

Nota : Le cytosquelette d'une cellule est l'ensemble organisé des polymères biologiques qui lui confèrent l'essentiel de ses propriétés architecturales et mécaniques

 

Concernant les paramètres microbiologiques, les valeurs seuils concernent les bactéries E. coli et les entérocoques intestinaux.

Le suivi du tritium (isotope radioactif de l'hydrogène) ne figure plus dans la liste des paramètres indicateurs. En revanche, l’uranium figure comme nouveau paramètre par rapport à la Directive actuelle.

En plus des sources humaines, l’uranium est un élément radioactif naturellement présent dans le sol. Il peut se dissoudre dans les eaux souterraines et se retrouver dans l’eau potable (lorsqu’elle est contaminée).

Le projet de texte demande aussi un suivi du plomb et des légionnelles.

 

Accès à l'eau

Pour ce qui concerne l'accès à l'eau, les mesures restent identiques à la précédente version.

Lorsque cela est techniquement possible, en tenant compte des conditions comme le climat, les États membres sont invités à installer dans les espaces publics des équipements de distribution.

Les Etats peuvent aussi encourager la fourniture de cette eau dans les administrations et les bâtiments publics, voire la proposer gratuitement ou à faible coût pour les clients des restaurants, cantines et services de restauration (c’est déjà le cas en France).

Sur ce point le projet de directive ne va pas plus loin et ne traite pas le sujet de l'abordabilité et de la prévention des coupures d’eau pour les foyers qui ne sont pas en mesure de payer leurs factures.

 

Les prochaines étapes avant l’adoption définitive du texte

Le 27 novembre 2020 a été publiée la position (UE) n° 14/2020 du Conseil en première lecture en vue de l’adoption de la Directive du Parlement européen et du Conseil relative à la qualité des eaux destinées à la consommation humaine (refonte).

Cette position, très technique, a été adoptée par le Conseil le 23 octobre 2020.

Elle reflète le compromis entre le Conseil et le Parlement européen, avec l'aide de la Commission. Une fois adoptées, les modifications apportées à l'actuelle directive vont remédier aux lacunes recensées dans son évaluation REFIT. Ces modifications sont censées augmenter considérablement le niveau de protection de l'environnement et de la santé humaine contre les effets néfastes de l'eau potable contaminée.

Cette position a été transmise au Parlement européen, où elle fera l'objet :

  • d'une annonce en séance plénière ;
  • d'un vote au sein de la Commission de l'environnement ;
  • d'un vote par la plénière.

 

Le Parlement européen devrait, en deuxième lecture, approuver la position du Conseil en première lecture sans amendement.

La directive entrera en vigueur 20 jours après sa publication au Journal officiel de l'Union européenne.

Visiter la page consacrée à la réunion du 23 octobre 2020 ici

 

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